La gestion durable des sols est essentielle pour assurer la productivité et la résilience des systèmes alimentaires face aux défis climatiques et environnementaux.
Par D. M.
Au cœur des écosystèmes agricoles, les sols sont une ressource non renouvelable à l’échelle humaine. Ils fournissent les nutriments nécessaires et occupent une place vitale dans le cycle de l’eau. La conservation des sols est devenue une priorité incontournable pour le Maroc, un pays où l’agriculture joue un rôle crucial dans l’économie et la sécurité alimentaire, avec près de 15% du PIB et environ 40% de la population active. La santé des sols est directement liée au bien-être économique et social. Le Royaume fait face à plusieurs défis en matière de dégradation des sols, notamment l’érosion, la salinisation, la désertification et la perte de fertilité. Ces problèmes sont exacerbés par des pratiques agricoles non durables, l’urbanisation et les effets du changement climatique.
L’érosion des sols, en particulier, représente une menace significative, affectant environ 75% des terres arables. Conscient de cette réalité, le gouvernement a mis en place une série de réglementations visant à protéger les sols et à garantir une agriculture durable. Parmi ces mesures phares, on peut citer la loi n°11-03 sur la protection et la mise en valeur de l’environnement, mettant en place des dispositifs de protection des sols contre les actions humaines nuisibles et encourageant des process agricoles durables.
La Stratégie nationale de développement durable (SNDD) inclut des objectifs spécifiques pour la conservation des sols, visant à réduire la dégradation et à promouvoir des techniques agricoles respectueuses de l’environnement. Dans le Plan Maroc Vert (PMV), l’une des composantes clés est l'amélioration de la gestion des ressources naturelles, y compris les sols, à travers l'usage de technologies agricoles avancées et la promotion de cultures résistantes. Le Programme de lutte contre la désertification vise à restaurer les terres dégradées et à prévenir la désertification en promouvant la plantation d'arbres et l'utilisation de techniques agricoles durables. Cependant, ces lois et réglementations sont d’ordre général.
Lors d’un atelier organisé à Rabat par l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), en collaboration avec la FAO (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture) et le Centre international de recherche agricole dans les zones arides (ICARDA), les experts ont plaidé pour une législation spécifique afin de garantir la sécurité alimentaire. Au cours de cet atelier, les chercheurs ont dressé un état des lieux de la situation des sols au Maroc, révélant que 30% de la superficie totale est caractérisée à divers degrés. Ils ont souligné l'urgence d'une stratégie nationale pour atténuer la dégradation des sols et augmenter la productivité de manière durable, en favorisant une agriculture raisonnée pour assurer une alimentation durable pour les générations futures.
De ce fait, une nouvelle réflexion juridique a été engagée pour élaborer un projet de loi spécifique visant la protection environnementale des sols, à l’instar des mesures déjà prises pour l’eau et l’air. Ce projet de loi ambitieux repose sur plusieurs principes essentiels. Il reconnaît l’appartenance des sols au patrimoine commun de la nation, les considérant comme un bien collectif nécessitant une protection commune. Il met en avant la prévention et la précaution, en adoptant des mesures pour éviter la dégradation des sols et en prônant une approche prudente face aux risques. Le principe du pollueur-payeur est également central, obligeant les entités responsables de la pollution des sols à supporter les coûts de leur remise en état. Le projet encourage une gestion intégrée et une participation active des parties prenantes, tout en respectant la vocation naturelle et productive des terres.
De plus, la loi propose plusieurs instruments complémentaires, tels qu’une gestion rationnelle de l’utilisation des sols, des dispositions spécifiques concernant la pollution des sols, la réhabilitation des sites contaminés et la responsabilité pour les atteintes aux sols. Toutefois, pour que ces efforts portent leurs fruits, il est crucial de renforcer la sensibilisation des agriculteurs et d'encourager l'adoption de pratiques agricoles durables à grande échelle. La pérennité de la sécurité alimentaire au Maroc dépendra en grande partie de la réussite de ces initiatives de conservation des sols.
Source: Finances News Hebdo fnh.ma